samedi 24 mai 2014

♫ Mon interview de Clarika

Après Sheller, Murat, Manset, Corine Marienneau de Téléphone, Vive la Fête, Sébastien Schuller et Romain Humeau (Eiffel), voici mon interview de Clarika réalisée pour Bakchich en 2009 (à l'occasion de la sortie de l'album Moi en mieux).

Interview de Clarika (propos recueillis en mai 2009) :

Bakchich : Quelles sont vos influences (littéraires, cinématographiques, etc.), quels ont été vos premiers chocs musicaux (et les derniers) ?

Clarika : Les auteurs « classiques » qui m’ont fait aimer la lecture sont : Camus, Flaubert, Sarraute, Butor, Proust, Albert Cohen, Prévert, Mauriac, Queneau, Garcia Marquès… Depuis deux, trois ans, je me suis mise à lire beaucoup d’auteurs « contemporains ». J’ai un faible en ce moment pour les femmes écrivaines… Alice Ferney, Marylis de Kerangal, Dominique Mainard, Alona Kihmi, Véronique Olmi... Mais je suis aussi une fidèle de Modiano, Emmanuel Carrère…
Je vais pas mal au cinéma. Les derniers films vus : Villa Amalia, Boy A, The Country Teacher, Ponyo sur la falaise (avec mes filles), Gran Torino
Pour les Français, j’adore les vieux Sautet (Vincent François Paul et les autres, Les Choses de la vie, etc.), Téchiné en général, Tavernier, les vieux Rohmer (j’ai eu ma période Rohmer où j’allais tout voir !) et j’en oublie plein c’est sûr (les frères Dardenne, Almodovar, David Lynch, Ken Loach, Gong Li…).
Me premiers chocs musicaux réels datent de l’adolescence (si on passe la période de
l’enfance marquée par les 45 tours de Sheila, Boney M et Martin Circus avec LA chorégraphie, indispensable, devant la glace…). J’ai en fait découvert la « musique » par le biais de chanteurs qui écrivaient leurs textes et qui me touchaient d’abord par leur propos. Les  Gainsbourg, Bashung, Higelin, Renaud, Thiéfaine, Souchon, Lavilliers furent mes chanteurs de chevet à l’adolescence. Les Rita Mitsouko furent le groupe qui incarnait pour moi la folie de la scène et Catherine Ringer fut sans doute une des chanteuses qui me donna envie de  faire le « show », tout comme Annie Lennox ou Nina Hagen que j’adorais. J’écoutais aussi les Clash, Joe Jackson, Springsteen, les Red Hot, des vieux Stones, Bowie, Lou Reed et les chanteuses comme Patti Smith, Rickie Lee Jones, Marianne Faithfull. Et je mentirais par omission en omettant de citer Trust et AC/DC qui caressèrent (à leur manières) mes oreilles d’adolescente fiévreuse et exaltée !

Bakchich : Quels souvenirs gardez-vous de la période Boucherie Productions, label alternatif sur lequel est sorti votre premier album ?

Clarika : Boucherie fut ma première maison de disques et j’ai eu la chance à l’époque de signer pour un premier album dans un label indépendant « de qualité ».
J’étais la première d’un nouveau département de Boucherie qui s’ouvrait à ce moment-là à des groupes ou artistes moins rock alternatif…
Ça a été très vite, entre le coup de fil de Hadji Lazaro qui recevait notre petite cassette et la signature… ça répondait à notre urgence du moment, c’était génial, et on a eu les moyens (petits mais réels) de faire un premier album sans concessions et qui nous ressemblait, et de partir tout de suite sur les scènes le défendre. Ça nous a donné, à JJ Nyssen (mon complice) et moi, le LA  pour la suite et la détermination pour faire ce qu’on avait envie de faire, comme on en avait envie.

Bakchich : « Bien mérité » est un tube en puissance mais, à l’époque du vite consommé et des textes très premier degré, une chanson mélodieuse faisant appel à une écoute attentive a-t-elle une chance d’être programmée en boucle dans les médias ? Ne risque-t-elle pas de faire peur aux programmateurs frileux (pléonasme), de crainte justement qu’elle soit interprétée au premier degré par les auditeurs ? 

Clarika : J’aurais aimé vous démentir mais vous touchez juste. Quand on a décidé de faire de ce titre un « single », la maison de disques a émis des réserves mais nous étions persuadés - JJ Nyssen, Florent Marchet (les réalisateurs de l’album) et moi même - qu’elle flippait pour rien, le titre étant perçu de manière assez forte et ne laissant personne indifférent a priori. La maison de disques, malgré ses craintes, nous a suivis dans ce premier choix (croyant malgré ces réserves au potentiel du titre) et « pris le risque » (je ne pensais pas que cela en serait un). Or, effectivement, il y a une réelle frilosité des programmateurs radio qui ont peur que :
- soit les gens prennent cela au premier degré (ce qui est rarissime, lorsque ces mêmes personnes ont « accès » au titre !
- soit, et là ils ne le disent pas mais on le comprend, que les gens ne soient tout simplement pas d’accord avec le propos… et là, on le savait, ils n’ont pas toujours tort : certaines réactions sur la chanson (parfois violentes) le prouvent !!
Voilà, je m’attendais bien sûr à des « réactions » mais pas à cette peur des radios de déranger les auditeurs. Nous ne pensions pas avoir écrit un brûlot subversif, loin de là (et je ne le pense toujours pas d’ailleurs). Ceci étant dit, je ne regrette pas ce choix car la chanson vit sa vie vraiment, sans un grand soutien des radios mais par le net aussi et les gens qui la diffusent eux-mêmes et la font passer, etc. Et par l’accueil réservé par la presse également.

Bakchich : « Bien mérité » est symptomatique de la force de vos textes. On sent chez vous une envie de marquer les consciences, d’interpeller l’auditeur,  sans jamais  tomber dans le côté « donneur de leçon ». Pouvez-vous nous en dire plus sur votre façon d’envisager l’écriture d’une chanson ?

Clarika : J’écris à l’instinct et suis assez brouillonne d’une manière générale, mais mon souci premier c’est que mon propos soit perçu comme je pense qu’il doit l’être et j’aime que l’auditeur reçoive vraiment ce que j’ai voulu faire passer (de l’émotion, un message, de l’humour) comme je crois qu’il va le recevoir. Après, les titres vous échappent et c’est ça qui est chouette aussi, c’est que les interprétations divergent – si je puis me permettre ! -). C’est d’ailleurs ce qui me touche dans la chanson : cette spontanéité, cette accessibilité… Après, chacun a son style, sa manière de… Je sais que je suis en général au plus près de moi, et qu’il m’est difficile de tricher en m’inventant des sensations non éprouvées par exemple. En écrivant moi-même mes textes, j’ai le choix de mettre en scène ma réalité comme je veux et de composer mon petit monde à ma sauce…

Bakchich : On sent dans la production du disque, comme sur les précédents, un tiraillement omniprésent entre chanson française tendance variétés et psychédélisme pop/rock à l’anglo-saxonne. Alors la question s’impose : Stone (et Charden) ou Beatles ? 

Clarika : Les deux !! C’est ce qui me plaît dans la « variété » au sens noble du terme. Pouvoir être touché par une pure chanson variétoche, comme on dit (genre un vieux slow italien avec la voix rauque du chanteur qui vous saisit sans que vous ne compreniez vraiment pourquoi) ou un vieux slow psyché de Bowie.

Bakchich : Le classique de Renaud « Mistral gagnant » aurait pu être signé Clarika, pour cette mélancolie poétique et cette part d’enfance prégnantes dans votre œuvre. Est-ce qu’il existe des chansons – dans le répertoire français ou étranger - qui vous rendent artistiquement  « jalouse » ?   

Clarika : Vous me parlez de « Mistral Gagnant », ça me touche car c’est sans doute LA chanson du répertoire français que je garderais s’il n’en fallait qu’une ! Quand une chanson me plaît plus que la moyenne, je n’éprouve jamais de jalousie mais plutôt de l’admiration, et ça me motive pour écrire et essayer d’être à la hauteur…

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