mardi 1 octobre 2024

♫ "In a Landscape" de Max Richter : expérience sensorielle extra-musicale. Vous n'êtes pas prêts !

 


Entrez dans l'univers du Mozart de la mélancolie 


Musique d'ascenseur ? Easy listening ? Musique au kilomètre ? Que nenni mes amis !

Ici, il s'agit de grand art, aussi révolutionnaire que Mozart en son temps, dans un genre totalement différent.

Les Français ont le Mozart de la finance. Les Germano-Britanniques, eux, ont le Mozart de la mélancolie, c'est mieux.


Oui, j'ose le dire. Car l'écoute de ce disque ne laisse pas indemne, si pour autant les conditions d'écoute requises pour le grand voyage sont réunies.

Car avec In a Landscape, l'auditeur procède à une immersion profonde en une expérience qui ne fait aucune concession à la laideur du monde.

A l'heure de la vitesse, des tapotages frénétiques et compulsifs sur les écrans, du zapping permanent, quel bonheur de recevoir cette oasis de douceur en totale rupture avec la société ambiante. Un refuge !

Ce disque ondule en harmonie avec les sens retrouvés, lorsqu'ils sont au repos, lorsqu'ils ne subissent plus aucune agression de l'extérieur.

Un disque autiste peut-être, puisqu'aujourd'hui, ne pas rentrer dans les clous de la folie revient à être considéré comme "différent".

Un disque qui prend le temps de se développer, de se déployer, comme la lecture d'un livre (la pochette n'est pas innocente).

Un disque à la fois en rupture avec son époque, sur la forme, mais dans le fond en phase avec la forte demande actuelle de refuges, de cocooning (Cf le carton des vidéos "musique vintage" et d'ambiances naturelles apaisantes sur YouTube), à la recherche d'un temps perdu pour se couper d'une société devenue aliénée, où l'on n'a même plus le droit de rire sans autorisation de délirer. 

Un disque de repli courageux. Une bulle salutaire à l'image du clip "Movement, Before All Flowers", où l'on voit une jeune femme lire un bouquin, pendant 4 minutes, en plan continu, perturbée malgré tout par l'environnement oppressant, en permanence (dans les cinq dernières secondes, on peut entendre les vroum vroum insupportables de ceux qui ne jouissent qu'au volant de leur bagnole, qui n'ont que ça pour se sentir exister). 

Je vous en conjure, écoutez bien au casque les toutes dernières secondes et regardez la tête de la fille à ce moment-là. C'est génial. Tout en subtilité, sans jamais surligner les effets, contrairement à ce qui se pratique partout :



Il y a quelque chose de religieux dans ce disque. Quelque chose de l'ordre du recueillement. Un pass pour l'autre-côté du miroir. Impossible de ne pas voir des moments volés de sa vie défiler, les visages de souvenirs se matérialiser, à l'écoute de ce miracle sonore hors du temps.


In a Landscape est bien plus qu'un paysage. C'est un voyage vers l'inconnu, peut-être le dernier voyage, apaisé. Il n'y a plus besoin d'accompagnement, car seule la musique accompagne.



99,9% de la population ne saisira absolument rien de ce temple de quiétude où repose l'intimité du Beau.

Et c'est heureux. 

Cela nous permet de nous reconnaître, entre membres d'une communauté certes discrète, contrairement à beaucoup d'autres : celle qui n'a pas encore vendu son âme !


Disque totalement subversif, qui va brûler comme un encens pendant tout l'automne dans les chaumières où la vie rayonne encore.

A savourer seul, dans le silence, allongé sur son lit, de la première à la dernière note, pour accéder au génie de cette expérience hors du commun.

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